En 1853, le couple Schumann rencontre un jeune homme de vingt ans, fraîchement débarqué de Hambourg : Johannes Brahms, venu se présenter sur la recommandation de Franz Liszt et du violoniste Joseph Joachim. Robert Schumann décide de le prendre sous son aile et de lui apporter son soutien. Il écrit un article paru le mois suivant dans la Nouvelle Gazette musicale (Neue Zeitschrift für Muzik), long panégyrique où Schumann déploie tout son art pour vanter les qualités de son cadet. Il intervient par ailleurs auprès de l´éditeur Breitkopf & Härtel pour faire publier quelques-unes de ses œuvres. Cet engagement contribuera à rendre rapidement Brahms célèbre en Allemagne.

Lors de cette rencontre le jeune Brahms fait également la connaissance de Clara, de quatorze ans son aînée. Rencontre qui marquera fortement la carrière de Brahms, mais aussi sa vie intime. Suivra pour Robert Schumann une série de succès (voyage triomphal à Hanovre) et de quelques dernières créations, dont un concerto de violon dédié à Joachim. Courte embellie puisque le 27 février suivant, Schumann, de plus en plus sujet aux hallucinations et pris d´une crise de désespoir, se jette dans le Rhin. Il n´en sera repêché que pour être conduit dans un asile psychiatrique, laissant Clara seule avec six enfants (et enceinte d´un septième). Il s´éteindra dans cet asile le 29 juillet 1856. C´est alors que commencent à se resserrer les liens entre le jeune homme et Clara. Les médecins ayant interdit à cette dernière de se rendre au chevet de son mari, c´est le jeune Brahms, logé dans la maison des Schumann, qui se fera le messager entre les deux époux (par la suite, il déménagera à Bonn).

Quels que soient les sentiments qu´éprouva Clara à l´égard de son ami Johannes, elle n´en exprimera pas moins jusqu´au dernier jour un véritable culte pour la mémoire de Robert, son véritable amour. Alors, amis chers ou amants ? Laissons-les donc reposer en paix et garder leur secret au fond de leur tombe. Ce qui importe est que nous demeurions attachés à honorer leurs mémoires et leurs musiques : celles de trois grands artistes : Johannes Brahms, figure majeure de l´Histoire de la musique, Clara Schumann, compositrice et plus grande pianiste de son temps, l´immense Robert Schumann et l´amour si fort de ce couple exemplaire.

Voici les œuvres que vous pourrez entendre dans ce récital, témoignages de leurs grands talents :

  • Les charmantes Romances opus 94 ont été initialement composées pour hautbois en 1849 par Robert Schumann et offertes en cadeau de Noël à son épouse Clara. Elles constituent la centième œuvre du compositeur. Durant toute sa vie, Robert Schumann les a surtout entendues jouées au violon. Les éditions Simrock ont publié en 1851 des arrangements pour clarinette et pour violon.
  • Les deux Sonates pour clarinette ou alto et piano opus 120 sont les dernières œuvres de musique de chambre du compositeur allemand Johannes Brahms. Il les a écrites pendant l’été 1894 (soit trois ans avant sa mort), après avoir entendu en concert le clarinettiste Richard Mühlfeld. Bien qu’inspirées par les talents de ce dernier, elles délaissent toute virtuosité : ce sont des œuvres « écrites pour soi, comme un journal intime » (Claude Rostand). Mühlfeld en assure la création avec Brahms au piano en novembre 1894 devant un public enthousiaste, rassemblant notamment Joseph Joachim et Clara Schumann.
  • Clara Wieck-Schumann compose les Trois Romances opus 22 en 1853 à Düsseldorf. Elles seront publiées en 1855. Elles sont dédiées à l’ami violoniste du couple Schumann, Joseph Joachim, qui les joue en tournée avec la compositrice. La première Romance est teintée d’un pathos digne d’une mélodie tzigane. Sa fin fait référence au thème principal de la 1ère Sonate opus 105 pour violon de Robert Schumann. La deuxième Romance est plus syncopée et ornementée. La dernière est aussi longue que les deux premières réunies : avec de longues mélodies et un accompagnement de piano foisonnant.
  • Robert Schumann écrit les 3 Fantasiestücke opus 73 en février 1849, en deux jours seulement. Il les intitule d’abord «Soiréestücke» (Pièces de soirée) avant de choisir le titre définitif « Fantasiestücke » (Pièces de fantaisie), auquel Schumann tenait beaucoup : il l’a en effet utilisé pour plusieurs œuvres, notamment son opus 12, composé en 1837. Ce titre poétique met en avant la notion romantique fondamentale, selon laquelle l’expression créative est le produit de l’imagination sans limite de l’artiste. La connotation de « fantaisie » annonce et justifie également les changements d’humeur imprévisibles et soudains, « passant de l’ombre à la lumière et de la réflexion intérieure à l’exubérance extravertie». Quelques jours après son écriture, une première représentation est donnée en privé par Clara Schumann et le clarinettiste Johann Gottlieb Kotte. Bien qu’elles aient été conçues à l’origine pour clarinette et piano, Schumann a indiqué que la partie de clarinette pouvait également être exécutée au violon ou au violoncelle.

Durée environ 65′

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