
Lors de cette « Soirée à Vienne », des œuvres de deux grands compositeurs, Franz Schubert et de Johannes Brahms, seront interprétées. Ils ont tous deux vécus dans la célèbre capitale autrichienne.
La Sonate D664 en la majeur de Franz Schubert, en trois mouvements fut écrite pendant l’été 1819 à Steyr où Schubert séjournait. Le musicien l’aurait destinée à la fille d’un de ses hôtes qui, selon ses propres termes, était très charmante et jouait bien du piano. Les circonstances de sa composition expliquent certainement le climat d’insouciance légère. Dans cette sonate qui conjugue à merveille simplicité de forme et séduction mélodique, on trouvera malgré tout quelques assombrissements passagers. « L’ensemble demeure toutefois singulièrement printanier : le chant y est roi d’un bout à l’autre, ce qui fait de cette sonate une des plus populaires de son auteur. Les deux premiers mouvements exhalent un tendre lyrisme qui renvoie sans cesse au monde du Lied ; quant au final, avec son thème de danse gracieusement déhanchée et sa vivacité dans les registres élevés du clavier, c’est un pur jaillissement de bonheur, comme un frais sourire de jeune fille. » (Michel Rusquet)
Johannes Brahms revient au piano en 1879, après un long silence : 16 années séparent les Variations sur un thème de Paganini des Fantaisies opus 76 et des Rhapsodies opus 79. Les trente pièces groupées en huit cahiers de l’opus 76 à l’opus 119, constituent la contribution la plus précieuse qui soit à la musique de piano du romantisme finissant.Ces courtes pages renoncent aux grandes formes de la sonate ou de la variation. Brahms a utilisé deux genres opposés : le capriccio et l’intermezzo. Les capricii, de tempo rapide, léger, fantasque, offrent un traitement rythmique intéressant : ce sont des pages agitées, véhémentes parfois, au caractère de ballade nordique (déjà rencontrée dans l’opus 10). L’intermezzo, en revanche, est plus modéré, contemplatif : « C’est le nordique, un peu morose, aux pensées automnales, d’une belle maturité humaine, douloureux parfois, et teinté de pessimisme, de ce « Weltschmertz », cette vague douleur du monde qui a accablé les allemands du XIXème siècle… » (Claude Rostand). Pour son cycle de l’opus 118, écrit durant l’été 1893, Brahms compose essentiellement, en dehors d’une Romance calme et sereine et de sa célèbre Ballade au caractère héroïque, des intermezzi.
La Fantaisie en fa mineur, D. 940, opus posthume 103 pour piano à quatre mains, fut composée par Franz Schubert en 1828, soit l’année même de sa mort. Elle est la seule œuvre qu’il ait explicitement dédiée à la jeune comtesse Caroline Esterházy, une de ses élèves qu’il aimait profondément et sans espoir, ainsi qu’en attestent des témoignages d’époque. Tout ceci nimbe cette œuvre, « dense et troublante », d’une atmosphère « extatique » qui contribue « à accentuer le caractère tragique d’une musique où les silences parlent autant que les notes », selon le critique Jean-Luc Macia dans la Revue des deux mondes de septembre 2015. Elle est d’ailleurs la plus célèbre, la plus tardive et la plus aboutie de ses compositions pour piano à quatre mains — un genre où Schubert excellait. Elle est aussi la dernière des Fantaisies de Schubert, une de ses formes préférées par la liberté de structure qu’elle lui offrait, forme qu’il a contribué à enrichir et à porter à son paroxysme d’expressivité.
Bonne soirée dans le Vienne de 1818, 1828 et 1893 !
Durée environ 65′
Eric Ramin et Julia Fayolle, piano
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